PIERRE JODLOWSKI
La Ralentie
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Conception, composition, lumières et vidéo : Pierre Jodlowski
Scénographie : Claire Saint-Blancat
Clara Meloni, soprano
Jean Geoffroy, percussion
Pierre Jodlowski, électronique
Frank Berthoux, diffusion du son
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Extrait de La Ralentie, poème d’Henri Michaux
Ralentie, on tâte le pouls des choses; on y ronfle ; on a tout le
temps; tranquillement, toute la vie.
On gobe les sons, on les gobe tranquillement ; toute la vie.
On vit dans son soulier.
On y fait le ménage.
On n’a plus besoin de se serrer.
On a tout le temps.
On déguste.
On rit dans son poing.
On ne croit plus qu’on sait.
On n’a plus besoin de compter.
On est heureuse en buvant;
on est heureuse en ne buvant pas.
On est, on a le temps.
On est la ralentie.
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L’œuvre de Michaux touche à des fibres intérieures particulières. Sa traduction musicale suscite une densité d’écoute inhabituelle.
Publié pour la première fois en 1937, La Ralentie est le texte le plus éminemment lyrique de Michaux. Il vient comme le calme après la tempête, ce silence si particulier qui surgit à la suite d’un choc violent et bouleversant. Il évoque aussi bien le voyage initiatique de l’âme que la dérive du corps devenu un miroir brisé du monde.
La musique mène une périlleuse traversée de ce que Michaux appelle « l’espace du dedans » ; tel un territoire à explorer, le paysage se remplit de minuscules ou de spectaculaires événements.
Jodlowski a cette force, cette humilité, cette capacité de donner aux sons le souffle même de l’œuvre écrite, à faire entrer le spectateur dans l’univers des écrivains qu’il chérit.
Aujourd’hui, il est un des rares compositeurs qui sait traduire ces états de grâce en musique, sans les dénaturer.
Pierre Jodlowski, lui-même, à l’électronique live, entouré de Clara Meloni, soprano et de Jean Geoffroy, percussionniste, explore et rend le texte de Michaux jusque dans sa plus subtile intériorité.